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Alger, Tifariti, Tindouf

Première immersion à Alger avec les supporters du club de l’USMA

Impressions d’Algérie

Des spectacles tels qu’il nous a été donné de voir lors des matchs de qualifications de la coupe du monde de football entre l’Algérie et l’Égypte et le festival pan africain des arts de la rue agissent comme un déclencheur, un exutoire aux années de bouleversements sociaux, de guerres civiles dévastatrices, de villes, de communautés, de familles déstabilisées par le spectre de la suspicion et de la peur. L’exposition de l’une ou de l’autre facette de ces endroits donne à la caméra, à l’artiste, un aperçu rare des réactions que peut avoir une population, contrainte par l’histoire, la culture, la religion, et le stress post-traumatique, dans des moments non contrôlés comme ceux ci. C’est comme si tout le monde attendait une raison d’être ouvertement heureux. La passion et le fanatisme que provoque le football et le désir de gagner tout de suite, dans l’instant, offrent une vision rare de ce monde. La claustrophobie de l’histoire a ouvert une fenêtre à ces peuples, un moment d’exposition.

Dans le jeu et hors jeu, les femmes mènent le jeu…

Le ballon roule sur un désert de dunes dans un paysage immense, passe devant des panneaux routiers « attention traversée de chameaux », contourne un barrage de police et roule à l’intérieur du camp de réfugiés de Tindouf.
Le spectateur découvre, le long du trajet du ballon, des tentes de nomades, des constructions précaires en briques et en terre, des chèvres dans des enclos de fortune, d’improbables grandes antennes radios en métal, des antennes paraboliques plantées dans le sable et des câbles électriques à moitié enterrés.
Le ballon entre alors dans le bâtiment de l’Union Nationale des Femmes Sahraouies. Sur les murs du couloir, on peut lire des slogans politiques en arabe et en espagnol sur le rôle des femmes. Le ballon nous emmène dans différents lieux où l’on peut voir des femmes dans leurs activités quotidiennes: cliniques, écoles, marchés, réunions politiques, studios artistiques, centres de distribution d’aide alimentaire et à la maison.
Nous suivons le ballon qui roule dans le désert, passe devant des chameaux et des chèvres sauvages et qui accompagne le rythme des mouvements souples des melfas des femmes, une version moderne de l’habit traditionnel fait à partir de tissus colorés et chatoyants, pour capturer la sensualité de l’éternel voilé/dévoilé des visages.
Nous allons près de cet autre « Mur de la Honte »(2 750 km de long) qui sépare la zone libérée du territoire occupé par les marocains où les femmes improvisent une manifestation en brandissant toujours le drapeau sahraoui. En arrière plan, sur le mur, on peut voir des soldats marocains qui observent. Le ballon se rapproche ensuite des femmes qui travaillent sur un projet de déminage pour débarrasser le territoire libéré des bombes « cluster » lancées pendant la guerre à la fin des années 80. Au fur et à mesure, le spectateur réalise comment ces femmes nourrissent leur tradition et culture, leur mouvement politique, leur relation inhabituelle au modèle patriarcal, à la vie, à l’amour et à la mort.